Utilisateur:Yug/Cryoconservation et biodiversité

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sdfLa cryoconservation à but de préservation de la biodiversité représente une technique de conservation ex situ utilisée dans de multiples projets de lutte contre la disparition d'espèces et l’érosion de la biodiversité. De la même manière que chez l’humain, des ovocytes et des spermatozoïdes sont stockés dans des banques d’ovules ou des banques de sperme, respectivement, une telle démarche peut être appliquée aux espèces menacées présentes dans les listes de l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature[1].

Récupération des gamètes[modifier | modifier le code]

La technique de récupération du sperme ou des ovules varie d’une espèce à l’autre. Dans le cas des cervidés, les spermatozoïdes peuvent être obtenus par électroéjaculation ou par des techniques relevant de la masturbation.[2] La récupération des ovocytes représente quant à elle une procédure plus lourde. L’extraction des gamètes peut être réalisée en zoo, en aquarium, ou à l’état sauvage, pour accroître la diversité génétique des cryothèques. Dans ce dernier cas, des équipes dédiées anesthésient l’animal avant le prélèvement.

En France, le Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN), à travers notamment son antenne de la Haute-Touche,[3] constitue l’une des centres de recherche les plus investis dans des projets de cryoconservation animale, avec une focale sur les cervidés. La conservation du cerf sika de Formose, espèce asiatique menacée, représente l’un des projets-phare de l’institution,[4] lancé dès le début des années 2000. On recense à travers le monde plusieurs dizaines de projets de cryoconservation de vertébrés (rhinocéros, tigre, éléphants, etc.), dont certains ont été lancés dès les années 1980.[5]

Les solutions développées sur ces espèces menancées sont ensuite réutilisées par les projets de conversation d’espèces animales domestiques ou d’espèces exploitées, en aquaculture notamment.[6]

Par ailleurs, il existe ensuite un groupe d'espèces pour lesquelles il est particulièrement complexe de récupérer les gamètes dans une visée d’insémination artificielle. On pensera par exemple aux mammifères marins ne pouvant être conservés en delphinarium (rorquals, baleines bleues, etc.), et pour lesquels l’extraction d’ovocyte ou la récupération de sperme en milieu naturel est complexe.

Conservation du matériel génétique[modifier | modifier le code]

Le matériel génitique le plus stable, généralement sous forme de graine végétales, est cryoconservé à -18°C. Les projets de cryoconservation d’espèces animales, où les gamètes et la matière génétique est plus fragile, nécessitent des température de cryopréservation but basses, typiquement de -196°C. La durée de conservation est également un paramètre à prendre en compte, le temps multipliant les opportunité de dégradations du matériel génétique. Si du matériel génétique végétale doit être conserver sur de longue durée, celui-ci peuvent être conservé à des températures de -196°C.

L’un des avantages que présente la cryopréservation, en tant que technique de conservation ex situ, réside dans la possibilité de stocker de vastes quantités de matériel génétique dans des espaces réduits. Ainsi, Yann Locatelli, chercheur au MNHN, rapportait disposer de l’information de 400 individus issus de 35 espèces, dans l’équivalent de deux congélateurs.[7] Il est donc possible de conserver une grande diversité génétique pour une espèce donnée sans nécessiter d'infrastructures physiques, de logistique d'entretien et d'alimentation majeures.

Réutilisation du matériel génétique[modifier | modifier le code]

La réanimation du matériel génétique cryoconservé soulève de nombreuses questions techniques quant à la capacité à obtenir des individus viables à partir des éléments conservés[8]. Les difficultés technologiques et logistiques associées à ces techniques sont importantes, et les jardins et conservatoires botaniques, où sont conservés des individus vivants se reproduisant de manière naturelle ou assistés demeurent centraux dans les approches de conservation ex situ, c’est-à-dire en dehors du milieu naturel.[9][10]

Consernant les espèces pour laquelle la récupération de matériel génétique ne pose pas de difficulté particulière, se pose ensuite la question de la gestion des mères porteuses disponibles pour participer au programme de cryoconservation. En effet, même conservé à des températures basses, -196°C, les gamètes ne sont pas viables éternellement. Il faut dès lors des mères porteuses pour régénérer à intervalles réguliers spermatozoïdes et ovocytes, même avant d’envisager une réintroduction dans le milieu naturel. L’intervalle auquel ce renouvellement doit intervenir dépend de l’espèce concernée. Or pour les espèces les plus menacées – y compris celles qui sont conservées dans des zoos, la disponibilité des mères porteuses peut constituer un problème, dans la mesure où, par définition, elles sont rares ou simplement absentes.

L’une des solutions partielles à ce défi logistique réside dans la compatibilité inter-espèces, dans une certaine limite. Ainsi, au MNHN, après insémination artificielle, les embryons de cerf sika du Formose ont pu grandir jusqu’à leur terme dans l’utérus de cerfs élaphes, relativement communs en France.[11] Dans un taxon donné, des espèces-hôtes non menacées peuvent ainsi théoriquement jouer le rôle de plaques tournantes pour le maintien de gamètes viables, et la réintroduction futures d’espèces en danger.

Généralisation[modifier | modifier le code]

La Réserve mondiale de semences du Svalbard, ouverte en 2008, est possiblement le cas le plus vaste de cryoconservation en terme de diversité génétique. Cette généralisation s'applique à la conservation des graines végétales, le matériel génétique le plus facile à conserver.

La technique pose néanmoins un certain nombre de défis, si elle devait être passée à l’échelle pour des entités plus diverses. Il n’y a pas à ce jour de projet visant à centraliser, dans une institution unique, les différents projets de cryopréservation animale. Une telle démarche de centralisation et de systématisation de la démarche de cryoconservation, popularisée par le film Jurassic Park, relève pour le moment de la politique-fiction.

Deux grands types d’arguments contre la mise en place à grande échelle de politiques de cryoconservation animale apparaissent. Les premiers sont de nature logistique : ils sont centrés autour des difficultés de récupération et de préservation sur le long terme de l’information génétique. Les seconds relèvent de l’évolution des conditions de vie sur terre. Du fait du réchauffement climatique et plus généralement de l’accroissement de la pression anthropique sur les milieux naturels, la réintroduction d’espèces menacées pourrait devenir de plus en plus complexe, nullifiant l’intérêt de conserver leur matériel génétique dans des cryothèques. Aux différents arguments présentés ici sont associés des contre-arguments de nature variée.

Réintroduction et aires de répartition[modifier | modifier le code]

La question de l’évolution des conditions de vie sur Terre, et donc du potentiel de réintroduction des espèces, se pose du fait de l’emballement du réchauffement climatique. Les modèles de répartition d’espèces (en) sont notamment utilisés pour prédire, pour un scénario climatique donné, les aires de répartition potentielle d’une espèce.[12] Depuis plusieurs décennies, des recherches montrent régulièrement la réduction drastique induite par les changements globaux sur ces aires de répartition. A la hausse des températures s’ajoute la multiplication des événements climatiques extrêmes (sécheresses, vagues de chaleur, etc.) susceptibles de menacer la survie d’une espèce.[13]

L’érosion rapide de la biodiversité liée à la pression anthropique, si importante que l’on parle sixième crise d’extinction constitue plus généralement un argument récurrent dans les débats sur la pertinence de la conservation ex situ, et par extension, de la cryoconservation. En substance, les détracteurs de ces formes de conservation critiquent l’utilisation de ressources[14] pour préserver des espèces alors que d’éventuels projets de réintroduction feront face à de grandes incertitudes, notamment du fait de la disparition ou de l’altération de leurs niches écologiques.[15]

À l'inverse, si de nombreux biomes sont déteriorés et menacé par la surchauffe climatique, leur capacité biotique risquand de s'effondrer, par exemple sous l’effet de la désertification, certains biomes actuellement inhospitaliers pourraient à terme se révéler plus propices[12] à des programmes de réintroduction. Le deuxième contre-argument consiste à rappeler que pour les espèces menacées ou ayant disparu de leur habitat naturel, l’abandon des programmes de conservation ex situ débouche avec une quasi-certitude sur l’extinction de l’espèce. Dès lors, du point de vue leur préservation, l’incertitude quant à la possibilité d’une réintroduction est préférable à la certitude de la disparition.

Références[modifier | modifier le code]

  1. « La Liste rouge des espèces menacées en France », sur UICN France (consulté le )
  2. « RRC: Semen extraction by manipulative technique in the black r... », sur www.rhinoresourcecenter.com (consulté le )
  3. « « Dernière chance pour la biodiversité » : la cryogénisation, une solution contre l’extinction des espèces ? », Le Monde.fr, {{Article}} : paramètre « date » manquant (lire en ligne, consulté le )
  4. Sylvie BRIET, « L'arche de Noé cryogénique », sur Libération (consulté le )
  5. (en) Jörns Fickel, Asja Wagener et Arne Ludwig, « Semen cryopreservation and the conservation of endangered species », European Journal of Wildlife Research, vol. 53, no 2,‎ , p. 81–89 (ISSN 1439-0574, DOI 10.1007/s10344-007-0089-z, lire en ligne, consulté le )
  6. « Fish sperm cryopreservation in France: from laboratory studies to application in selective breeding programs | French Ichthyological Society - Cybium », sur sfi-cybium.fr (consulté le )
  7. « « Dernière chance pour la biodiversité » : la cryogénisation, une solution contre l’extinction des espèces ? », Le Monde.fr, {{Article}} : paramètre « date » manquant (lire en ligne, consulté le )
  8. Streczynski, R., Clark, H., Whelehan, L. M., Ang, S. T., Hardstaff, L. K., Funnekotter, B., ... & Mancera, R. L. (2019). Current issues in plant cryopreservation and importance for ex situ conservation of threatened Australian native species. Australian Journal of Botany, 67(1), 1-15.
  9. « Conservatoire botanique national du Bassin parisien, CBNBP », sur cbnbp.mnhn.fr (consulté le )
  10. Mounce, R., Smith, P., & Brockington, S. (2017). Ex situ conservation of plant diversity in the world’s botanic gardens. Nature Plants, 3(10), 795-802.
  11. Sylvie BRIET, « L'arche de Noé cryogénique », sur Libération (consulté le )
  12. a et b Inés Ibáñez, James S. Clark, Michael C. Dietze, Ken Feeley, Michelle Hersh, Shannon LaDeau, Allen McBride, Nathan E. Welch, Michael S. Wolosin, « PREDICTING BIODIVERSITY CHANGE: OUTSIDE THE CLIMATE ENVELOPE, BEYOND THE SPECIES–AREA CURVE », Ecology, Ecological Society of America, vol. 87 « Determinants of Biodiversity Change », no 8,‎ , p. 1896-1906 (lire en ligne)
  13. (en) Henrique M. Pereira, Paul W. Leadley, Vânia Proença et Rob Alkemade, « Scenarios for Global Biodiversity in the 21st Century », Science, vol. 330, no 6010,‎ , p. 1496–1501 (ISSN 0036-8075 et 1095-9203, DOI 10.1126/science.1196624, lire en ligne, consulté le )
  14. (en) Mohammed Kasso et Mundanthra Balakrishnan, « Ex Situ Conservation of Biodiversity with Particular Emphasis to Ethiopia », International Scholarly Research Notices, vol. 2013,‎ , e985037 (DOI 10.1155/2013/985037, lire en ligne, consulté le )
  15. Stefano Canessa, Sarah J. Converse, Matt West et Nick Clemann, « Planning for ex situ conservation in the face of uncertainty », Conservation Biology: The Journal of the Society for Conservation Biology, vol. 30, no 3,‎ , p. 599–609 (ISSN 1523-1739, PMID 26306549, DOI 10.1111/cobi.12613, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]

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